com. du 11 janv 2006
Association Pour l’Interdiction des Véhicules Inutilement Rapides
Communiqué de presse
11 janvier 2006
La vitesse inutile devant le Conseil d’Etat
Le Conseil d’Etat examinera dans sa séance publique du lundi 16 janvier à 14 heures la requête de l’APIVIR demandant la limitation de la vitesse des voitures à la construction.
La situation actuelle est incohérente et dangereuse. Comment peut-on autoriser la mise en circulation de véhicules pouvant rouler à plus de 200 km/h quand on sait que la vitesse maximale autorisée sur nos routes est de 130 km/h, que ces véhicules sont responsables de centaines de morts chaque année et que la limitation de la vitesse des véhicules à la construction est une mesure simple, d’un coût négligeable, sans contrepartie négative et déjà en vigueur pour certaines catégories de véhicules ?
Les constructeurs automobiles proposent aux usagers de nombreux modèles inutilement rapides, puissants et lourds parce qu’ils peuvent le faire techniquement et qu’il y a des acheteurs pour ces voitures conçues pour ne pas respecter les limitations de vitesse. Dans le même temps la sécurité routière est devenue une priorité politique, avec des succès évidents obtenus en réprimant plus efficacement les vitesses excessives. Les motivations écologiques et économiques de limiter le gaspillage du pétrole se sont associées à l’intérêt de sécurité routière pour contraindre les pouvoirs publics à agir. Nous ne pouvons pas à la fois signer les accords de Kyoto, prétendre qu’il y a le feu à la maison et regarder ailleurs en délivrant des cartes grises à des véhicules qui tuent, consomment et polluent plus que les autres.
Les enjeux de cette mesure dépassent largement la mortalité par accident à grande vitesse sur les autoroutes de liaison. Les statistiques des assureurs, les publications des chercheurs ont prouvé que les véhicules inutilement rapides ont un surrisque d’accident sur tous les types de voies. Le tribunal de Montpellier vient de condamner à 5 ans de prison un automobiliste qui a tué trois personnes en traversant à 170 km/h une intersection avec une route à quatre voies dans une zone limitée à 70 km/h.
L’APIVIR a été créée dans le but d’obtenir du gouvernement qu’il impose la limitation de la vitesse des voitures particulières dès la construction, comme cela se fait pour les poids lourds, les tracteurs et les cyclomoteurs. Après avoir, dans un premier temps, demandé au ministre d’interdire la mise en circulation de véhicules pouvant dépasser la vitesse maximale autorisée, l’APIVIR a déposé un recours au conseil d’Etat visant à l’obliger à prendre cette mesure.
Le Gouvernement est conscient de la nécessité de limiter la vitesse des véhicules à la construction, puisqu’il a publié à la fin du premier Comité interministériel de sécurité routière tenu le 18 décembre 2002 un communiqué affirmant que : «La France poursuivra au niveau communautaire ses démarches pour favoriser la prise en compte de la limitation de la vitesse sur l’ensemble des véhicules à la construction. ». Cependant, lorsqu’il s’agit de passer à l’acte, il recule.
Une comparaison s'impose. En mars 2004, le Conseil d’Etat a jugé que l’Etat avait commis une faute pour ne pas avoir géré correctement le risque lié à l’amiante. Il a considéré que l’existence d’une responsabilité des entreprises n’exonérait pas l’Etat de son devoir de documenter le risque et de prendre des mesures réglementaires nécessaires pour le maîtriser.
La situation dans le domaine du risque routier est de même nature. L’Etat ne se donne pas les moyens de documenter le risque lié à la puissance, à la vitesse et au poids inutile des véhicules. Il délivre des cartes grises à des véhicules qui peuvent rouler à plus de 200 km/h alors qu’un article législatif du code de la route indique que « « Les véhicules doivent être construits, commercialisés, exploités, utilisés, entretenus et, le cas échéant, réparés de façon à assurer la sécurité de tous les usagers de la route. ». L’Etat commet une faute caractérisée en ne prenant pas le décret d’application assurant le respect de cet article. L’accident de la route est la première cause de mortalité des jeunes adultes. Il est aussi la première cause de mort accidentelle au travail, et une limitation de la vitesse maximale des voitures serait la simple application des principes généraux de prévention validés dans le domaine de la sécurité au travail, qui imposent de combattre le risque à la source et de remplacer ce qui est dangereux par ce qui est moins dangereux.
Dans sa réponse à notre argumentaire, le ministre des transports ne conteste aucune des données techniques de notre recours concernant le risque, ni le fait qu’il ne cherche pas à le documenter. Il reconnaît le bien fondé de notre demande et affirme que la France poursuit au niveau de l’Union cet objectif. Le seul argument qui nous est opposé est que les traités signés par la France ne lui permettent pas d’agir unilatéralement. Toutes les dispositions de la réglementation et de la législation nationale s’effaceraient donc devant l’exigence commerciale garantissant la libre circulation des marchandises. Cette position n’est pas sérieuse, la France a déjà utilisé les dispositions de l’article 30 des traités qui lui permettent d’agir unilatéralement pour des raisons de sécurité sanitaire, par exemple lors de la crise sanitaire provoquée par l’encéphalite bovine. En outre ce que nous demandons n’exige pas une transformation structurelle des voitures, simplement un réglage de la vitesse maximale par l’électronique embarquée qui équipe tous les véhicules modernes, ce qui n’entraverait pas la libre circulation des marchandises. Un tel réglage est d'ailleurs déjà exigé par la France pour les motocyclettes dont la puissance est limitée à 100 chevaux et ni les constructeurs, ni la Commission n’ont déposé de recours auprès de la Cour de justice de Luxembourg.
Si le droit à la sûreté inscrit dans la déclaration universelle des droits de l’homme et la protection de l’environnement ont un sens, il faut limiter la vitesse des voitures à la construction. La mesure assurerait le respect de plusieurs dispositions de notre législation ou de notre réglementation. Elle est soutenue par une grande majorité de nos concitoyens dans tous les sondages consacrés à ce sujet.
L’ensemble des documents correspondant à cette procédure est disponible sur le site internet www.apivir.org, ouvert le 10 octobre 2004.