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Nommer une commission en lui demandant par une lettre de mission de donner son avis sur un problème appelant des choix politiques et techniques fait partie du fonctionnement normal de l'Etat.  Plusieurs d'entre elles ont émis un avis sur le problème posé par les véhicules inutilement rapides et de ce fait inutilement dangereux.

Commission ayant rédigé le "Livre blanc sur la sécurité routière" (Documentation Française - 1989) à la demande du Premier Ministre Michel Rocard. Cette commission était présidée par M. Giraudet.

La formulation de la proposition de limiter la vitesse à la construction a été formulée de la façon suivante :
"La deuxième consisterait à limiter par construction la vitesse des véhicules légers.

En effet, comment ne pas être frappé par une contradiction majeure et qui ne cesse de s'accentuer :

- d'une part, il existe une véritable volonté de diminuer le fléau que représentent les accidents de la route, et tous les experts de tous les pays s'accordent pour reconnaître l'indiscutable efficacité des limitations de vitesse, qui est pleinement confirmée par les variations concordantes des taux d'accidents corporels et des normes de vitesse ;

- d'autre part, les constructeurs d'automobiles du monde entier, irrésistiblement emportés par les possibilités de la technologie, produisent des véhicules de plus en plus rapides, dont les vitesses d'utilisation courante (dites « de confort ») s'écartent chaque année plus largement des vitesses limites autorisées, incitant ainsi de facto les conducteurs à transgresser les limites autorisées, aussi bien sur les autoroutes que sur les routes ordinaires.

En 1967, 10 % des voitures françaises alors produites dépassaient 150 km/h ; en 1987 ce taux atteint 73 %. Et n'a-t-on pas vu, lors du dernier « Mondial de l'automobile », un nombre impressionnant de modèles (et pas seulement de sport) atteignant ou dépassant 220 à 250 km/h ?

Cette fuite en avant est-elle raisonnable ? Certainement pas pour la sécurité des routes. Peut-être pas non plus pour les constructeurs : si la recherche des performances a permis, sans nul doute, des progrès techniques considérables, il est temps maintenant de concevoir des véhicules pour le grand public, mieux adaptés à leur usage social, plus économes d'énergie et plus respectueux de l'environnement naturel et humain.

Ce n'est que par l'instauration d'une norme d'immatriculation limitant la vitesse par construction (le cas échéant par la technique du limiteur de vitesse) qu'il peut être mis fin à cette fuite en avant. C'est sans doute aux environs de 160 km/h que pourrait être fixée cette norme.

Sans penser qu'une telle mesure soit immédiatement applicable, la Commission propose qu'au plan international la France affirme une telle position, comme l'un des axes stratégiques de sa politique de sécurité routière et comme un objectif important des futurs accords communautaires.

Parallèlement, dans ce même but et dans la perspective déjà évoquée d'un accord communautaire sur les limitations de vitesse, la France doit continuer, comme elle l'a toujours fait depuis 1984, à demander que la RFA limite la vitesse sur ses autoroutes de rase campagne, l'espace autoroutier allemand demeurant le seul argument des constructeurs spécialisés dans le « haut de gamme » pour promouvoir des modèles atteignant des vitesses vertigineuses, mais inadaptées à la réalité de la circulation sur les voies publiques."
Cette formulation est présentée en termes adaptés à la situation de la France au sein d'une communauté d'intérêts. Elle prévoit la négociation européenne pour faciliter l'aboutissement d'une telle décision, mais indique que la France doit en faire l'un des axes stratégiques de sa politique de sécurité routière. La limitation à 160 km/h était un choix destiné à rendre la mesure plus acceptable, sans vouloir placer d'emblée le niveau maximal à 130 km/h.

Commission ayant rédigé le rapport sur les "Gisements de sécurité routière" (Documentation Française - 2002) à la demande de François Perdrizet, Directeur de la recherche et des affaires scientifiques et techniques du ministère de l'équipement. Il a été rédigé par un groupe d'experts sous la direction du préfet Régis Guyot. Il indique (page 158) à propos de la vitesse, et sous le titre "réduire nos contradictions les plus flagrantes" :
Bien entendu la vitesse excessive traverse l'ensemble des gisements comme facteur déclenchant ou aggravant de l'accident et de ses conséquences. A l'issue de ses travaux, le groupe se sent le devoir de mettre l'accent sur quelques unes des contradictions les plus flagrantes que la situation actuelle en matière de vitesse fait ressortir. On ne peut pas en effet :
 - mettre dans les mains des conducteurs, y compris les plus jeunes et les plus inexpérimentés, des véhicules dont les caractéristiques (puissance et vitesse en particulier) sont sans rapport avec la réglementation et s'étonner tant de leur utilisation effective que des résultats de celui-ci.

Les pouvoirs publics, au plan français comme européen, ne pourront pas longtemps reculer devant des mesures que la connaissance scientifique des facteurs de sur-risque (puissance, vitesse, poids) et des conséquences de leur non prise en compte rend de plus en plus inévitables mais qui sont retardées pour des raisons étroitement économiques. Peut-on croire qu'elles seront plus faciles à prendre sous le sceau de l'urgence, après des procès retentissants, plutôt qu'en évaluant à l'avance leurs effets économiques et sociaux afin d'opérer un traitement à froid, concerté et planifié ?

Conseil National de Sécurité Routière (séance du 11 avril 2004 - le texte ci-dessous est publié sur le site www.equipement.gouv.fr)
 

SYNTHESE :

Le Conseil a été saisi le 12 février dernier par le ministre Gilles de Robien de la question de l’opportunité d’une limitation de la puissance autorisée en fonction de l’ancienneté du permis de conduire :

Même si les données dont nous disposons ont certaines limites, les spécialistes s’accordent pour reconnaître pour les jeunes conduisant des véhicules sur-puissants, un sur-risque important qui découle de la combinaison de deux sur-risques : âge et puissance du véhicule.

Pour autant, ces données ne permettent pas de recommander l’interdiction des véhicules sur-puissants aux conducteurs novices.

Si on considère en effet le sur-risque dans l’absolu, il faudrait limiter la mesure aux seuls jeunes hommes et écarter les jeunes filles et dans une moindre mesure les hommes novices d’âge plus mûr, ce qui serait difficilement acceptable d’autant que l’opinion des Français est plutôt en faveur d’une limitation globale de la puissance pour tous les véhicules.

Si on considère le risque « attribuable », c’est à dire le nombre de vies qu’une telle mesure permettrait de sauver, on constate que le sur-risque lié à la puissance ne semble pas plus élevé pour les moins de 25 ans et que l’enjeu sur cette seule tranche de la population est assez faible, ce qui conduit là aussi à écarter une mesure limitée aux seuls jeunes et à préconiser plutôt une limitation pour tous les véhicules de la puissance ou mieux de la vitesse par construction.

De plus, on peut s’attendre des retombées positives du développement du contrôle sanction automatisé et de l’application du permis probatoire.

Enfin cette mesure se heurte à des problèmes pratiques. Il faudrait publier une liste des véhicules concernés puisque cette information ne pourra être inscrite sur la carte grise. La conduite du véhicule familial pourra être interdite alors que les jeunes ne sont propriétaires de leur véhicule que dans deux cas sur trois.

 

Dans ces conditions, le Conseil national de la sécurité routière :

-          Rappelle que la vitesse est un des premiers facteurs de l’insécurité routière et qu’un des moyens de lutter contre l’insécurité routière est de lutter contre le développement des véhicules inutilement rapides et puissants,

-          Déconseille dans l’immédiat une mesure qui ne serait pas justifiée si elle était limitée aux jeunes et se heurterait à un certain nombre de difficultés pratiques mais recommande de suivre régulièrement l’implication des jeunes conducteurs de véhicules sur-puissants, dans les accidents, grâce aux nouvelles possibilités du fichier accident.

-          Demande au gouvernement de poursuivre les efforts entrepris en vue de faire avancer au niveau européen le projet de limitation de la vitesse par construction,

-         Encourage les pouvoirs publics à appliquer avec détermination la politique définie en matière de contrôle des vitesses ainsi que les actions engagées vis à vis des jeunes notamment avec le permis probatoire,

-          Recommande de sensibiliser sur leur responsabilité morale les adultes (parents, concessionnaires etc.) qui peuvent être amenés à confier à des jeunes conducteurs des véhicules sur-puissants,

-          Recommande de rendre public la classification des véhicules par les assurances et de  promouvoir les véhicules classés comme les plus sûrs pour combattre ainsi les préjugés qui font des véhicules les plus puissants, les véhicules les plus sûrs.